Intra-Muros N#1

Swiss Art Awards
Office fédéral de la culture

Basel. Switzerland

12 June – 18 June 2006

Dans son célèbre recueil d’articles intitulé "White Cube": L’espace de la galerie et son idéologie, Brian O’Doherty compare le white cube aux limbes, espace hors du temps destinés aux morts. Selon son analyse, dans l’espace de la galerie le corps du spectateur est superflu, il est réduit à l’état de fantôme, et seul son OEil et son Regard y sont admis "Dans une galerie la solitude est de rigueur, en fait nous sommes absents. Etre présent devant une oeuvre d’art, revient à s’absenter à soi-même, à céder la place à l’OEil et au Spectateur. Ils sont les conventions régulatrices qui stabilisent ce sens de nous-même qui nous fait défaut. Ils prennent acte que notre identité est elle-même une fiction et nous donne l’illusion d’être présent. Dès lors nous objectivons et nous consommons l’art pour alimenter nos moi inexistants." Les frères Chapuisat ont proposés une série de pièces nommées Intra Muros se présentant comme des cimaises d’expositions, blanches et vierges, reflétant donc l’esthétique du vide propre au white cube. Une trappe discrète située sur la tranche de cette cimaise permet pourtant au spectateur de s’introduire dans le mur et de pénétrer un univers totalement opposé à celui qu’il vient de quitter. Un monde compact et plein dans lequel on avance qu’à grand peine, à la manière d’un spéléologue, c’est-à-dire en devant faire appel à toute la capacité physique, et à la présence, de son corps; ce dernier devient l’ "organe" de perception de l’oeuvre. Pour retrouver son corps, le Spectateur désincarné d’O’Doherty doit donc littéralement entrer dans le mur qui délimite l’espace vide et pur de la galerie. Se faisant, il disparaît du regard des spectateurs disséminés dans le white cube. Il se fond dans la seule matière persistante dans l’espace de la galerie pour faire littéralement corps avec cette matière et se voir lui-même ainsi rematérialisé.

(Arthur de Pury, 2010)

press: Eine Münze werfen

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